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Que boire avec un mont d’or chaud : les meilleures associations entre vins et fromage fondu

Que boire avec un mont d'or chaud : les meilleures associations entre vins et fromage fondu

Le mont d’Or. Nom de fromage, synonyme de plaisir interdit. Objet chaudement coulissant, prisonnier d’un écrin d’épicéa, que l’on libère à la petite cuillère ou au couteau, selon son humeur d’hiver. Ce Vacherin Mont-d’Or AOP – car il faut l’appeler par son nom complet, avec les égards dus à une telle personnalité – s’offre généralement gratiné au four, entier dans sa boîte, parfumé d’un trait de vin blanc ou d’ail confit, et appelle un accompagnement liquide à la hauteur de sa générosité.

Mais alors, que servir dans le verre pour que la danse soit harmonieuse ? Quel vin saura tenir tête à la suavité aromatique et au corps crémeux du mont d’Or chaud, sans sombrer dans la fadeur ou l’excès ? Ici commence notre exploration organoleptique, une traversée oeno-fromagère entre accords de terroir, audaces vinicoles et secret de sommelier.

Mont d’Or en fusion : portrait d’un fromage capiteux

Avant d’ouvrir la cave, accordons quelques instants à ce fromage de saison. Le mont d’Or n’est disponible qu’entre septembre et avril, période où il est à son apogée sensorielle. Produit à cheval entre le Doubs et le Jura suisse, il porte en lui les paysages forestiers et la fraîcheur des pâturages d’altitude. Son affinage dans des cercles d’épicéa – ces fameuses sangles boisées – lui confère des notes résineuses et beurrées qui explosent littéralement après un passage au four.

Servi chaud, il devient une fondue miniature, intime, concentrée, avec une texture nappante et une saveur où se mêlent noisette, champignon, crème fraîche, et un parfum lacté presque animal. Face à tant de richesse, il convient de ciseler nos accords pour ne pas submerger ni être submergé.

Les accords de terroir : évidence géographique, alchimie gustative

Commençons par l’instinctif : accorder un vin de la même région que le fromage. Cela paraît presque trop simple… jusqu’à ce qu’on goûte. Là, tout fait sens.

  • Un vin blanc du Jura (type Savagnin ou Chardonnay local) : Le Savagnin, nerveux et racé, avec ses notes d’amande, de pomme verte et sa trame oxydative dans ses versions typées « sous voile », crée un contraste saisissant avec la douceur coulante du fromage. Les Chardonnays jurassiens, plus fruités et ronds, jouent quant à eux une partition plus douce, presque en miroir, avec une finale étirée de pierre à fusil et de beurre noisette.
  • Un Côtes-du-Jura tradition (assemblage Savagnin/Chardonnay) : Ce vin tout-terrain, souvent élevé sous voile partiellement, offre le meilleur des deux mondes. Sa fraîcheur, sa minéralité, mais aussi une complexité aromatique particulièrement adaptée aux plats fromagers chauds. Le mont d’Or le remercie à chaque cuillerée.
  • Un vin jaune (carrément) : Pour les aventuriers. Ce nectar d’or vieilli 6 ans et 3 mois, à l’aromatique complexe de noix, de curry, de morille séchée et de sous-bois, peut magnifier un mont d’Or aux truffes ou agrémenté de champignons. Attention cependant à ne pas écraser le fromage : dosage et tempérance dans l’accord seront nécessaires.
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Les blancs en fraîcheur : une douche vive pour un plat onctueux

Si l’accord de terroir vous semble trop attendu, cap au large ! Le mont d’Or chaud, par sa texture fondue et son mordant lactique, accepte aussi très bien des blancs acides et tendus, capables de réveiller les papilles entre deux bouchées enveloppantes.

  • Un Riesling d’Alsace (sec) : C’est l’un des duos les plus convaincants. Le Riesling, citronné, tranchant, avec ses notes pétrolées et florales, fend le gras comme une lame bien aiguisée. Il relance la dégustation, épure, et sublime la complexité aromatique du fromage chaud. Mention spéciale aux terroirs schisteux ou granitiques, qui ajoutent une minéralité dynamique à l’ensemble.
  • Un Chablis : Le Chardonnay de Bourgogne septentrionale, dans sa version tendue et crayeuse, constitue une belle alternative à son cousin jurassien. En particulier sur des monts d’Or à peine aromatisés, il crée un pont de finesse et de fraîcheur très intéressant, presque iodé.
  • Un Chenin sec (Loire ou Montlouis-sur-Loire) : Pour les amateurs de volume en bouche tout en conservant une trame acide et vive. Les notes de coing, de miel léger et de foin sec du Chenin s’accordent joliment aux arômes boisés du fromage fondu. Et puis, quelle longueur !

Les rouges : terrain miné ou accord possible ?

Un mont d’Or chaud avec du vin rouge ? Voilà une idée qui hérisse autant de sommeliers que de montagnards. Pourtant, tout est question de finesse. On évite à tout prix les rouges tanniques (au revoir Bordeaux jeune, Syrah bodybuildée ou Cahors bourru), car les tanins se marient mal avec la caséine du fromage, produisant en bouche une sensation métallique et discordante.

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Cependant, un rouge léger, fruité, avec peu de structure, peut faire des merveilles en contrepoint.

  • Un Pinot Noir (d’Alsace ou du Jura) : Une robe claire, des tanins assagis, des arômes de cerise, de groseille, voire d’épices douces… Ce type de rouge glisse et se marie plutôt bien avec le fromage fondu, surtout s’il est accompagné de pommes de terre, de charcuteries, voire de cèpes poêlés.
  • Un Gamay (Beaujolais Village ou cru type Fleurie, Brouilly) : Là encore, on mise sur la gourmandise, le fruit rouge croquant, une jolie acidité et un alcool maîtrisé. Rien d’envahissant. Juste une compagnie joyeuse pour le mont d’Or, notamment dans une ambiance rustique, à la lueur des chandelles ou sous un plaid.

Et pourquoi pas des bulles ?

Accord audacieux, mais particulièrement satisfaisant : associer la rondeur soyeuse du fromage fondu à la fraîcheur et à l’effervescence d’un vin pétillant.

  • Un Crémant du Jura : Ses notes de fruits secs, de pomme mûre et son effervescence fine en font un compagnon tout trouvé pour l’élégance du mont d’Or. Alliance régionale, mais pas clichée.
  • Un Champagne brut nature ou extra-brut (100 % Chardonnay) : Le côté tendu, minéral, désaltérant de ces champagnes apporte un contraste vivifiant, presque salin, à la plénitude laiteuse du mont d’Or chaud. Une expérience gastronomique presque… méditative.

Accords alternatifs : quand les spiritueux s’invitent à table

Pour les plus aventureux d’entre vous, il est même possible d’explorer des alliances avec certains spiritueux, utilisés non pas en accompagnement direct, mais pour créer une expérience en plusieurs temps, avant le repas ou en digestif jumelé à un reste de croûte gratinée.

  • Une goutte de marc du Jura ou de kirsch artisanal : Dans un petit verre, pour démarrer ou terminer le repas. Ces eaux-de-vie rustiques flirtent avec le caractère affirmé du mont d’Or et peuvent être utilisées (avec parcimonie !) dans la cuisson même du fromage.
  • Un Vermouth blanc sec : Servi frais, voire en cocktail léger (Americano blanc par exemple), il peut étonnamment dialoguer avec l’onctuosité du fromage chaud par ses amers complexifiants. Une piste à tester entre amis, pour ouvrir le champ des possibles.
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Petite mise en scène pour une grande dégustation

Et maintenant ? Allumez le four, sortez la boîte de mont d’Or, ajoutez une gousse d’ail confit, un trait de Savagnin et un brin de romarin, puis enfournez. Pendant ce temps, ouvrez une bouteille que vous avez choisie ici, laissez-la respirer un peu (comme vous), et préparez quelques pommes de terre vapeur, une miche de pain craquante, et deux ou trois tranches de jambon cru bien persillé.

À table, laissez le fromage couler au centre, comme un cœur en fusion, et le vin l’envelopper doucement. Pas besoin de discours. Les regards qui se croisent, les sourires silencieux, suffiront à dire ce qu’aucune association mets/vins ne pourra jamais totalement expliquer.

Le mont d’Or, c’est une invitation à ralentir. À manger chaud, à boire juste, et à savourer l’hiver. Et si possible, à deux. Car comme le vin, ce fromage aime la compagnie.

Santé… et vive le fromage fondu !

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